Portrait : Eric Piboyeux, responsable pédagogique CFA MPS Formation
Publié dans le magazine « Profession recycleur » du 4 déc 2019 n° 1298, p 1 et 20, par Martine Chartier
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Récupérateur, un métier d’avenir
Bordeaux.- Des siècles durant, le métier de récupérateur s’est appris sur le tas. Il s’est peu à peu enrichi de connaissances plus fines, liées à la nécessité de connaître les besoins des marchés et de savoir opérer des distinctions entre les différents matériaux. Repérer les différents métaux non ferreux par exemple, c’est éviter toute erreur d’estimation de leur valeur. Étape par étape, à mesure que la palette des matières à trier et à traiter se diversifiait et que les techniques pour le faire se développaient, la récupération est devenue recyclage. Pour accompagner cette évolution et recruter de nouveaux collaborateurs, la formation joue un rôle fondamental. C’est d’ailleurs la raison d’être de MPS formation Aquitaine, près de Bordeaux, une structure associative qui était portée autrefois par le département et qui a été reprise par la fédération d’éducation populaire Léo Lagrange, et compte aujourd’hui huit instituts en France.
C’est là que tout commence pour Eric Piboyeux qui rejoint le secteur du recyclage en 2002, pour une formation soutenue par Federec d’un niveau post bac + 2 de responsable d’exploitation des industries du recyclage.
« C’est dans le cadre d’un stage que je suis entré au sein des établissements Decons, spécialiste du recyclage des ferrailles sur le sud-ouest. Le stage s’est très rapidement transformé en CDI. J’étais tout d’abord en charge des questions de QSE (Qualité-Sécurité- Environnement) avec les certifications ISO au départ, puis le poste s’est enrichi d’un travail sur les divers développements, l’ouverture de sites, des rénovations… Comme responsable du développement durable, j’ai notamment eu le plaisir de vivre la mise en place de la réglementation VHU, le travail avec les éco-organismes sur les DEEE. »
Des métiers très opérationnels
Il reprend sa liberté en 2014 et intègre une école d’ingénieurs.
« J’en avais envie pour me questionner sur mes méthodes, mon travail, mon approche des choses. »
Fin 2015, il valide son diplôme et tâte du conseil et de l’audit.
« C’était très intéressant de voir d’autres structures et d’autres organisations. »
En 2018 changement d’orientation : il rejoint MPS formation pour prendre en charge la partie environnement des cursus et le centre de formation d’apprentis des métiers de l’environnement (CFA) à Bordeaux qui propose des CAP, BEP, CQP, Bac pro de la branche recyclage. « Je suis ravi d’être revenu vers ces métiers que j’apprécie tout particulièrement. Il y a quelque chose d’un peu viral. » Depuis un an Eric a donc la responsabilité du CFA des métiers de l’environnement qui, en alternance, propose de former des opérateurs pour les entreprises du recyclage : agents de tri, réceptionnaires, conducteurs d’engins, pilotes de broyeurs… Tous les métiers très opérationnels. Les apprentis sont plutôt des jeunes gens de 16 à 22 ans, ils arrivent en formation initiale.
« Il faut déployer beaucoup d’efforts pour les convaincre que c’est un métier d’avenir, constate Eric, que de très belles carrières s’offrent à eux en partant du terrain, une véritable progression est possible dans ces métiers-là. Nous formons également des gens qui sont en entreprise, il s’agit là plutôt des CQP. C’est l’occasion en ressources humaines de valoriser des parcours professionnels. C’est souvent le premier diplôme qu’ils ont dans leur vie. Nous avons souvent des témoignages très touchants lorsqu’ils ont entre les mains leur diplôme CQP. L’entreprise de son côté fait preuve de reconnaissance à l’égard de son collaborateur. Lorsqu’une personne travaille depuis dix ans sur un poste de trieur, nous n’avons pas prétention à lui apprendre son travail. Nous abordons des thématiques transverses ou annexes comme la communication en équipe ou avec les responsables, le travail avec les autres services — la maintenance, la logistique, etc. »
L’objectif poursuivi est de donner de l’intelligence au poste, de faire comprendre ce qu’il y a en amont et en aval.
« On travaille mieux si l’on comprend ce qu’il se passe avant ou après, l’impact de son travail sur la matière finale. Nous travaillons également sur des standards — la sécurité au travail et la qualité. C’est pour moi un objectif de positionner ce CQP comme une marche. »
L’attractivité des entreprises
Pour mieux faire connaître le métier et l’environnement professionnel, le centre conduit une action sur le public apprenti par une prépa apprentissage.
« C’est un sas, décrit Eric, entre une fin de scolarité pour des jeunes qui sont un peu entre deux eaux, ne savent pas trop quoi faire, et les métiers du recyclage. Cette action s’inscrit dans le plan investissement compétences de L’État, donc nous avons un financement pour deux ans. »
En trois semaines assez intensives, cette prépa consiste à faire réfléchir les jeunes sur leurs projets, à leur donner envie de la formation par l’apprentissage, à les informer sur les métiers et le monde de l’entreprise.
« Il s’agit d’un parcours semi ludique, précise-t-il, ce ne sont pas des enchaînements de cours mais des mises en situation. Notre objectif est d’être assez bons pour leur faire signer un contrat d’apprentissage. »
Le bac pro s’intéresse aux mêmes métiers que les CAP et s’enrichit des métiers des déchets de l’assainissement.
« Nous leur demandons une prise de hauteur supérieure. Ils peuvent à l’issue, lorsque cela marche bien, assister des chefs d’exploitation. Ce sont des opérationnels de terrain. »
Eric Piboyeux est revenu dans un lieu qu’il connaît bien pour y avoir été formé. L’expérience acquise au fil des ans et la connaissance des difficultés de recrutement rencontrées par les entreprises du recyclage le conduisent à chercher des solutions originales.
« Je suis convaincu de l’attractivité des entreprises du recyclage dès lors que l’on arrive à faire passer la porte aux jeunes. »
Ces prépas sont offertes aux jeunes de toute la France avec la possibilité pendant trois semaines de se familiariser avec les métiers du recyclage. Ils sont assurés d’une prise en charge de la restauration et de l’hébergement, les missions locales peuvent les aider pour le transport. Le recyclage offre des postes très diversifiés, encore faut-il effectivement que les jeunes gens puissent les découvrir. Il y a fort à parier qu’à l’issue de la formation, une entreprise du secteur accueillera les apprentis.
Publié dans le magazine « Profession recycleur » du 4 déc 2019 n° 1298, p 1 et 20, par Martine Chartier
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